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26 mai 2017 5 26 /05 /mai /2017 12:26

Vers le retour des godillots

Le président n'a jamais exercé de mandat local, encore moins de mandat parlementaire. Mais il a une idée sur le fonctionnement du Parlement. On connaît son inflexibilité sur sa décision de réformer encore le droit du travail en ayant recours aux ordonnances, histoire d'aller très vite, de prendre les syndicats et la gauche de court. Sa hantise : une nouvelle levée de boucliers dans la rue et des navettes parlementaires qui ralentiraient la mise en œuvre de sa réforme dont on sait qu'elle aggravera la loi El Khomri.

Mais recourir aux ordonnances pour faire passer en priorité des mesures antisociales, donnant des garanties au patronat, aura aussi valeur de symbole. Le démantellement du Code du travail (avec aussi la réforme des Prudhommes, celle de la protection sociale, etc.) sonnera le lancement d'une autre réforme : celle du Parlement. Et ici, le modernisme qu'entendent incarner Emmanuel Macron et « La République en Marche » ne seront rien d'autre qu'une attaque en règle de notre démocratie.

Ne semblant craindre personne, le nouveau chef de l'État explique vouloir rendre le travail parlementaire plus efficace et plus fluide. Pour y parvenir, il propose un remède de cheval : suppression d'un tiers des députés ; réduction du temps législatif à trois mois (actuellement, le Parlement peut légiférer durant 9 mois, d'octobre à fin juin, et des sessions extraordinaires sont possibles de juillet à septembre) ; utiliser la procédure accélérée pour examiner les lois ; interdire la présentation à l'Assemblée des amendements rejetés en commission.

En clair, le projet de réforme du Parlement vise à faire adopter dans des délais très courts les lois voulues par le pouvoir, à limiter le temps de légiférer des élus au profit du contrôle parlementaire, à neutraliser le rôle des parlementaires en limitant les débats, à empêcher la possibilité de réorienter une loi. Pour de l'inédit, c'est de l'inédit. Avec un texte pareil, les parlementaires seront aux ordres de l'Élysée et de Matignon. Cela revient à leur subtiliser leur pouvoir législatif pour l'offrir au gouvernement !

Les conséquences seraient désastreuses. Avec moins de députés, le pluralisme sera réduit et les citoyens seront encore plus éloignés de leurs élus. Naturellement, le mouvement social en pâtira. C'est donc vers du présidentialisme pur et dur que dirige ce projet. La campagne législative qui vient de s'ouvrir constitue un dernier rempart contre les dangers qui menacent le peuple.

Philippe ALLIENNE

(Billet publié par Liberté Hebdo n°1273 du 26 mai 2017)

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