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23 février 2017 4 23 /02 /février /2017 20:55

Salauds de pauvres

Supprimer les pauvres. Voilà un programme qui devrait faire l'unanimité des candidats libéraux à la Présidentielle. Un programme de droite. Parce que les pauvres emmerdent cette société en l'empêchant de se développer. Ils donnent mauvaise conscience et ils coûtent cher. En plus, ils ne sont pas beau, ils sont grotesques et répugnants. Les pauvres, c'est la chienlit du système qui repose sur les banques, la finance et le profit. Les pauvres font chier, les pauvres chient au lit. Il faut les é-ra-di-quer.

Fort heureusement, les cathos pratiquants, les enfants de Rotshild, les amants de la fleur de lys, les héritiers de Vichy comme ceux de Von Hayek et de l'École de Chicago, les bons élèves de Bruxelles ont bien compris et sont à l'œuvre. Dans le viseur : les tricheurs et les distraits qui profitent du RSA. Le département du Nord compte 115 000 allocataires du Revenu de solidarité active. Le Conseil départemental a identifié 45 000 d'entre eux qui ne sont pas en règle. Soit ils ne sont pas inscrits à Pôle emploi (découragés, radiés, ou distraits ?), soit ils ne font rien pour se « réinsérer ». Alors, la traque a commencé.

A cette heure, ou presque, 7500 allocataires ont vu leur RSA réduit de 100 euros. Pour 450 autres, parce qu'ils n'ont pas répondu aux lettres de relance, c'est la suspension pour quatre mois. 535,17 € par mois, pour une personne seule, moins 100 € conduit l'allocataire sanctionné à vivre avec 435,17 euros. Avant d'être radié de pôle emploi. On oublie de dire que les personnes à la rue, qui sont domiciliées dans une association (type Secours populaire) pour la réception de leur courrier, ne pensent pas forcément à relever leur boîte aux lettres. Pour le président du Conseil départemental du Nord, la stigmatisation et la punition des plus démunis est une « question de vie ou de mort ». Certes, cela ne peut que faire augmenter le taux de chômage, mais l'État ayant diminué radicalement ses aides aux collectivités, le Département n'a d'autres choix que de faire la chasse aux allocataires qui ne sont pas en règle.

Dans cette logique, il n'y a guère de raison d'aller beaucoup plus loin dans la chasse aux chômeurs. Ainsi, les candidats Fillon et Macron ne se gênent-ils pas pour cibler et détruire le système d'assurance-chômage. Le premier espère économiser 10 milliards d'euros en remettant la dégressivité des allocations chômage sur le tapis et en s'attaquant aux chômeurs les plus pauvres qui souffriraient d'une diminution drastique de cette allocation. Il veut aussi que l'État ne soit plus garant de la dette de l'Unedic, une mesure qui aurait pour conséquence d'augmenter le déficit de celle-ci ! Quant au candidat Macron, il souhaite transformer l'assurance-chômage en... nouveau RSA !

En toile de fond, les Caisses d'allocations familiales se félicitent de leur efficacité en matière de lutte contre la fraude sociale. 43 000 fraudes (notamment au RSA) pour un montant de 275 millions d'euros auraient été détectées l'an dernier. Pour les candidats libéraux, cela représente une manne qui, à terme, devrait se chiffrer à plusieurs dizaines de milliards d'euros et permettrait de financer de nouvelles dépenses. Sauf que rien ne prouve la pertinence de cette prévision. Les salauds de pauvres ont toujours eu bon dos.

 

Philippe ALLIENNE

(Lire, sur ce sujet, Liberté Hebdo du 24 février 2017)

 

 

 

 

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